Dieudonné / Le Pen : Pourquoi l’un et pas l’autre ?

Dieudonné est un « humoriste » qui a fait de l’antisémitisme son fonds de commerce. Avec Alain Soral, son compère en ignominie, il multiplie les provocations nauséabondes. Son adhésion à l’extrême-droite est connue depuis longtemps ainsi que sa proximité avec Jean-Marie Le Pen. Après la terrible tuerie du mercredi 7 janvier dans les locaux de Charlie Hebdo puis celle de l’Hyper Cacher, vendredi 9, au moment où le slogan « Je suis Charlie », expression du haut-le-cœur généralisé contre cette horreur, se répandait à travers tout le pays, Dieudonné déclarait qu’il était Charlie Coulibaly, du nom du terroriste qui a sévi et tué à l’Hyper Cacher de Saint-Mandé.dieudoSoral

Le procureur de la République a immédiatement ouvert une information et ce mercredi 14 janvier, il est interpellé et mis en garde à vue pour apologie du terrorisme.

Dans le même temps, Jean-Marie Le Pen, président « d’honneur » (sic) et fondateur du Front national, interpellé pour des propos sur son site par le Huffington Post répond : « Est-ce que je dois m’habiller en noir? Je déplore la disparition de douze Français. Mais je ne suis pas Charlie du tout, je suis Charlie Martel, si vous voyez ce que je veux dire ! »

Tous ceux qui s’intéressent à l’histoire du racisme et du terrorisme dans notre pays savent très bien ce que le vieux leader fasciste veut dire.

Certes, Charles Martel, c’est ce chef politique et militaire qui, dans la formulation de l’histoire de France racontée aux petits français, arrêta « les Arabes à Poitiers » en octobre 732 (il y a 1300 ans !). Mais ce n’est pas de lui dont parle l’ancien proche de l’OAS. « Groupe Charles Martel », c’est le nom pris par les terroristes de l’extrême droite pour commettre leurs crimes. Et particulièrement, c’est ainsi que signa celui (vraisemblablement lié à l’OAS) qui a fait sauter le Consulat d’Algérie à Marseille, le 14 décembre 1973, faisant quatre morts et 20 blessés dont plusieurs mutilés…

Mais pas seulement, il y a eu plus de 20 attentats, plus ou moins graves commis sous ce nom : des mosquées, des bars fréquentés par les immigrés, des foyers Sonacotra pour travailleurs étrangers, des agences d’Air Algérie…

A Marseille, dans la nuit du 11 au 12 juin 1981, une bombe explose dans la cité d’urgence du Baou, construite en 1966. Vingt-neuf familles sont sinistrées. La même nuit, un autre engin est désamorcé devant la cité Bassens, dans le XVe arrondissement. Le 14 mars 1983, deux hommes en moto jettent une bombe à La Cayolle à 16 heures : deux gamins sont sérieusement blessés. L’attentat est revendiqué par le groupe Charles Martel.

Enfin, citons aussi l’affaire Jean de Broglie qui n’a jamais été complètement éclaircie : Le 24 décembre 1976, le député de l’Eure a été abattu de trois balles dans la tête au bas d’un immeuble du 17ème  arrondissement de Paris. Jean de Boglie avait été l’un des négociateurs des accords d’Evian qui ont précédé l’indépendance de l’Algérie. Le crime a été immédiatement revendiqué par le groupe Charles Martel, qui a expliqué avoir « liquidé le prince de Broglie en tant que responsable de l’invasion de la France par les hordes africaines ».LePen

Raciste et antisémite, Jean-Marie Le Pen a commencé sa carrière politique en militant pour l’amnistie des collabos, il a continué en allant torturer en Algérie. Proche de l’OAS, il a fondé le Front national avec des rescapés de la collaboration et d’anciens de l’OAS. Il sait donc parfaitement ce qu’il dit quand il fait référence à Charles Martel. C’est donc incontestablement une apologie du terrorisme. Pire même on peut penser, compte tenu de sa possible implication dans l’action de ces groupes, qu’il s’agit d’une véritable menace contre les populations issues de l’immigration.

Liberté, égalité, fraternité !

C’est la devise de la France. Samedi et dimanche nous avons manifesté au nom de la liberté et de la fraternité. Aujourd’hui, le gouvernement, la justice, l’opinion publique doivent montrer que notre pays est attaché à l’Egalité. Qu’aucune population n’est oubliée dans la protection que lui doivent les pouvoirs publics. Dieudonné et Le Pen ont commis le même crime : apologie du terrorisme. Si la justice ne réagit pas contre Le Pen, le message qui sera envoyé, extrêmement grave et en contradiction avec ce que notre peuple a voulu exprimer lors des manifestations de samedi et de dimanche, c’est que la réaction, la célérité et la sévérité de la justice dépendent de la nature de la victime.

Et là, les terroristes de tous poils auront gagné !