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Marine Le Pen à New York : Le camouflet pour la France

Le Time Magazine, fondé en 1923, fait partie de la presse institutionnelle aux Etats-Unis. Il organise régulièrement des événements « people » qui mettent en vitrine certaines personnalités. Dans les années précédant la deuxième guerre mondiale, les responsables du magazine avaient créé « The man of the year » (l’homme de l’année) et ils ont ainsi réservé cet honneur à des individus tels que Joseph Staline ou Adolf Hitler…

Depuis 1998, le Time a mis en place le Time 100 qui célèbre les « cent personnalités les plus influentes de l’année ». Marine Le Pen fait partie de la liste 2015. Elle y côtoie notamment le Coréen Kim Jong-Un, le Français Thomas Piketty, le Pape François, Vladimir Poutine, Barack Obama, Angela Merkel, Alexis Tsipras et quelques dizaines d’autres dont de nombreux artistes et animateurs de médias… Evidemment on ne peut que se demander pourquoi un tel honneur à la chef d’un parti d’opposition arrivé troisième dans une élection qui a mobilisé moins de la moitié des inscrits dans un pays comme la France où elle n’assume aucun poste de responsabilité. C’est accorder une importance plus que démesurée à ce personnage. Comme les responsables du Time ne sont pas complètement idiots, on ne peut lire dans cette invitation qu’une petite opération politicienne dirigée contre les gouvernants français. C’est aussi une nouvelle manœuvre visant à la banalisation d’un parti fasciste dont les racines et les thèses sont une insulte pour la démocratie.

Pourtant, c’est sans hésitation que la chef du parti d’extrême droite, anti-américaine, anti-système, toujours prête à dénoncer la peopolisation, habillée comme une star d’Hollywood, s’est précipitée sur le tapis rouge avec le sourire béat de circonstance, pour assister au gala qui s’est déroulé à New York le 21 avril…

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 Marine Le Pen, qui n’a visiblement pas peur du ridicule, pour justifier sa présence, a déclaré : « nous allons arriver au pouvoir et par conséquent il faut obligatoirement croiser, rencontrer, discuter avec les gens puissants dans leur pays respectif ». Quand on sait que la plupart des puissants de cette liste n’ont pas fait le voyage, et pour cause, la Marine a ainsi pu discuter tranquillement avec des gens aussi importants que Kanye West, Kim Kardashian, Julianna Moore ou tel ou tel rapeur, certes artistes reconnus, mais comme, selon son propre aveu, elle ne parle pas un mot d’anglais, il n’est pas sûr que l’échange ait pu avoir réellement lieu, ce qui est dommage pour sa propre éducation musicale et cinématographique.

En fait, par ce déplacement, elle veut montrer à son électorat qu’elle est reconnue internationalement et que sa potentialité de femme de pouvoir, est acquise à l’étranger.

Pour remercier, ses hôtes elle n’a pas hésité à affirmer « La France des oubliées n’est pas oubliée ». L’héritière Le Pen, dont le père doit sa richesse au détournement de l’immense héritage de la famille Lambert, dirigeante d’un Front national qui tire ses racines politiques dans l’ignoble collaboration avec les nazis et dans les nauséabondes actions terroristes de l’OAS, se prend pour la « France des oubliées » !

Pour tout dire, cette France de la collaboration, de l’OAS, du Front national et de la famille Le Pen, on aimerait bien l’oublier !

Die REICHSKRISTALLNACHT (la nuit de cristal)

Juillet 1938, la honteuse conférence d’Evian

En 1938, Hitler est déjà au pouvoir en Allemagne depuis quelques années et sa politique anti-juive y est cruellement à l’œuvre. On n’en est pas encore à la Shoah, mais les victimes d’Hitler sont nombreuses à chercher refuge ailleurs. Pour répondre à cette situation, Franklin D. Roosevelt, Président des Etats-Unis, organise une conférence internationale, qui se tient à Evian, à huis clos, du 6 au 14 juillet, sur les bords du lac Léman. 32 pays sont représentés, mais, comme actuellement, l’égoïsme des démocraties est la seule réponse au désarroi des réfugiés. Personne ne veut les recevoir. Cette honteuse fermeture des portes permit d’intensifier les persécutions antisémites partout en Europe. Les arguments « justifiant » cette attitude indigne étaient les mêmes qu’aujourd’hui, préjugés, coût de la solidarité et, il faut bien le dire, une certaine forme de racisme.

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La propagande allemande, très active et triomphante, titre au lendemain de la conférence : « Juifs à vendre ; même à bas prix, personne n’en veut ! ».

Quant à Hitler, dans les jours qui suivent, avec son cynisme haineux, il ne se prive pas de narguer les Occidentaux sur cet échec : « C’était honteux de voir les démocraties dégouliner de pitié pour le peuple juif et rester de marbre quand il s’agit vraiment d’aider les Juifs ! »

Grâce à ce gâchis, quelques mois plus tard, le 9 novembre 1938, la haine en action peut se déployer avec une nouvelle ampleur et on assiste à la « Nuit de Cristal ».

L’autre 9 novembre, il y a 80 ans.

Le 7 novembre 1938, un jeune homme de 17 ans, Herschel Grynszapan, révolté par l’expulsion en Pologne de sa famille résidant à Hanovre, se rend à l’ambassade d’Allemagne à Paris et tire sur un secrétaire d’ambassade, Ernst vom Rath. Ce dernier est conduit immédiatement en clinique et le jeune Herschel est arrêté. La police française appréhende aussi Abraham et Chawa Grynszapan, l’oncle et la tante de Herschel, et la justice les condamne pour « avoir accueilli un étranger en situation irrégulière ».

Dès que Hitler prend connaissance de ce fait, il élève Ernst Vom Rath au rang de conseiller d’ambassade et envoie ses médecins personnels à son chevet. Vom Rath décède le 9 novembre 1938 à 16h30.

Ce soir-là, les chefs nazis sont massivement réunis à l’ancien hôtel de ville de Munich pour commémorer le putsch de 1923. Goebbels y prend la parole pour les exhorter aux représailles et leur demande d’inciter et d’organiser partout des pogroms anti-juifs, en laissant croire à une réaction spontanée de la population.

Le crime va commencer immédiatement et se continuer toute la nuit du 9 au 10 novembre.

Les agresseurs se ruent à l’assaut des symboles de la vie juive. Des femmes sont violées, des gens sont tués, des magasins détruits, des synagogues brûlées et une vingtaine de milliers de juifs sont internés dans des camps de concentration. Ce sont sans doute les Berlinois qui ont donné le nom de « kristallnacht », nuit de cristal, à cet immense pogrom, en raison des milliers d’éclats de verre des vitrines brisées répandus sur la chaussée. En Autriche, la réaction de haine antisémite fut au moins aussi violente sinon plus.

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Après ces crimes, le gouvernement allemand condamne la communauté juive à payer un milliard de marks pour avoir causé des dommages « en provoquant la juste colère du peuple allemand ». Cette amende sera prélevée sur les avoirs confisqués aux Juifs depuis avril 1938.

En Allemagne seulement, sans parler de l’Autriche, la nuit de cristal a provoqué directement la mort d’une centaine de Juifs, sans compter les décès ultérieurs des blessés et les suicides. 7.500 magasins ont été détruits et 250 synagogues brûlées.

Cette nuit de haine fut le prémisse de la nuit du siècle, de ce crime que fut la Shoah. Elle a montré au monde, ou du moins à celles et ceux qui avaient les yeux ouverts, le visage du nazisme. La nuit de cristal a provoqué une grande indignation dans la presse internationale. Mais elle n’a pas changé l’attitude de la plupart des grands pays. Le 23 août 1939, Staline et Ribbentrop signent le pacte germano-soviétique. Quant au ministre français des affaires étrangères, Georges Bonnet, il discute poliment de la question juive en France avec son homologue allemand, von Ribbentrop. Georges Bonnet soutiendra d’ailleurs, après la défaite de la France, la politique du Maréchal Pétain. Les grandes institutions n’ont pas sérieusement réagi. En Allemagne, ni les églises, ni les milieux universitaires, ni les militaires n’ont émis de protestation.

Selon Friedlander, un seul prêtre allemand protesta contre la Kristallnacht : Lichtenberg, vicaire général de la cathédrale Sainte-Edwige à Berlin, avait osé dire qu’une synagogue en flammes « c’est également la maison de dieu ». Tous les autres avaient gardé le silence.

Quelques jours après la mort de Vom Rath, et au lendemain de la nuit de cristal, Georges Bonnet, ministre des affaires étrangères, assiste à la cérémonie funèbre en sa mémoire au temple luthérien de la rue Blanche à Paris.

Herschel Grynszapan, lors d’un transfert, et profitant d’un bombardement, arrive à s’échapper. Récupéré par la police fin 1940, il est livré à l’Allemagne par la France. Sans qu’on sache précisément ce qu’il est devenu, la dernière trace de lui date de fin janvier 1941 à la prison de la Gestapo (Geheime staatspolizei – police secrète d’état) à Sachsenhausen.

Eugenio Maria Giuseppe Giovanni Pacelli est élu pape le 2 mars 1939 sous le nom de Pie XII. Il avait été nonce à Munich en 1917, puis à Berlin de 1920 à 1929. Il n’a jamais caché sa germanophilie et il s’est abstenu, dans le « souci de protéger les catholiques allemands », de critiquer avant la guerre le régime nazi. Pie XII avait assisté en 1919 à la révolution et à la république des Conseils à Munich. Il était d’un anticommunisme convulsif et viscéral. Et en juin 1941, il était visiblement plus intéressé par l’opération Barbarossa lancée par l’Allemagne nazi contre l’Urss que par le sort des Juifs et des divers persécutés par les hitlériens.

Solitude, l’esclavage et Napoléon

Lorsqu’on parle de l’esclavage, on oublie souvent qu’il s’agissait d’une véritable industrie et qu’il était totalement intégré au fonctionnement de la société avec son outil de production : l’enlèvement de personnes en Afrique ou leur achat auprès de potentats locaux, leur transport en Amérique ou aux Antilles et toute une réglementation assurant leur propriété, généralement à des colons. Un texte de loi particulièrement révoltant leur est consacré, le Code Noir, publié sous la responsabilité de Louis XIV et, quand les esclaves ont voulu se libérer, l’armée de la France leur a fait la plus sale guerre possible.

La Révolution française de 1789 fait souffler sur les Antilles un vent de liberté. Les planteurs craignent que les idées républicaines ne conduisent à l’abolition de l’esclavage. Ils font alors appel aux anglais qui occupent Saint-Domingue, la Martinique et la Guadeloupe, au début de 1794. Le 4 février de cette année-là, la convention abolit l’esclavage. Victor Hugues est envoyé en juin en Guadeloupe. Avec l’aide des esclaves libérés, les troupes républicaines repoussent les Anglais. Ayant pris le pouvoir, Napoléon Bonaparte décide dès 1802 de rétablir l’esclavage et il envoie 7.000 hommes, dirigés par le général Antoine de Richepanse combattre les républicains et les esclaves libérés en Guadeloupe. Ces derniers sont désorganisés et moins armés. La brutalité et la cruauté de Richepanse seront telles que les combattants préfèreront mourir que de se rendre : le capitaine Ignace, chef marron rallié à Victor Hugues, se suicide au fort de Baimbridge et le colonel Delgrès mourra avec trois cents de ses compagnons en faisant sauter le bâtiment où ils s’étaient réfugiés.

Parmi les crimes de Richepanse et ses sbires, l’exécution de Solitude fut particulièrement ignoble. Cette jeune femme est issue du viol de sa mère par un marin sur le bateau qui l’emmenait d’Afrique en Guadeloupe. Dès l’adolescence, elle choisit la résistance et devient « nègre marron ». Elle prend alors le nom de Solitude. A l’arrivée de Richepanse, elle se bat aux côtés des troupes républicaines avec l’énergie du désespoir. Après la défaite elle est arrêtée par les sbires de Richepanse. Enceinte, elle est condamnée à mort et pendue le lendemain de son accouchement, le 29 novembre 1802. Elle avait trente ans.

(Pour plus d’information sur Solitude :

https://histoireparlesfemmes.com/2015/12/17/solitude-resistante-guadeloupeenne/)

Pourtant ce Richepanse non seulement fut remercié par Napoléon mais la France donna son nom à une rue de Paris. Il fallut attendre 2001 et l’élection de Bertrand Delanoë pour que, sur sa proposition, le conseil municipal de la capitale décide à l’unanimité de débaptiser cette rue qui s’appelle désormais rue du Chevalier Saint George.

Ce dernier, fils d’une esclave et d’un colon, fut un grand compositeur, un champion d’escrime et capitaine de la Garde. Il vécut dans la deuxième partie du 18ème siècle et mourut en 1799.

Mais il connût une deuxième mort quand le général Bonaparte, premier consul de la première République française , après avoir rétabli l’esclavage aux Antilles le 20 mai 1802, fit brûler toutes ses œuvres le même jour. Napoléon Ier interdit par la suite aux « noirs et gens de couleur » l’entrée à l’armée (29 mai 1802), l’accès au territoire métropolitain (2 juillet 1802) et — pour ceux qui s’y trouvaient déjà — par l’intermédiaire de Claude Régnier*, les mariages entre les Noirs et les Blancs (8 janvier 1803). La destruction de ses œuvres plus les lois raciales qui furent édictées par la suite ont conduit à l’oubli total de Saint-George.Chevalier Saint-George

Jusqu’à ce que des auteurs comme Balzac, Dumas ou de Beauvoir redonnent vie à son immense talent…

Il est dommage que, dans les écoles de la France, on n’apprenne pas la véritable histoire de notre pays et les crimes terribles sur lesquels elle est parfois assise. La compréhension de notre monde, le vivre ensemble et donc la paix y gagneraient beaucoup !

*Note : « EXTRAIT d’une circulaire du grand juge ministre de la justice (Claude Ambroise Régnier) relative à la prohibition du mariage entre les blancs et les noirs.
Du 18 nivôse an 11 (8 janvier 1803).

Je vous invite, M. le préfet, à faire connaître, dans le plus court délai, aux maires et adjoints faisant les fonctions de l’état civil dans toutes les communes de votre département, que l’intention du Gouvernement est qu’il ne soit reçu aucun mariage entre des blancs et des négresses, ni entre des nègres et des blanches.
Je vous charge de veiller avec soin à ce que ses intentions soient exactement remplies, et de me rendre compte de ce que vous aurez fait pour vous en assurer.

Signé : Régnier »

Claude Ambroise Régnier, qui a été le bras armé de Napoléon pour le rétablissement de l’esclavage est entré au Panthéon en 1814 et n’en est jamais sorti.
L’abbé Grégoire qui fut l’instigateur de l’abolition de l’esclavage en 1794, n’est entré au Panthéon qu’en 1989….